Les lois numériques publiées en 2015 et 2016

Le développement de la circulation des données

Dans l'étude d'impact de la loi pour une République numérique, le gouvernement résume très clairement sa volonté : Les « données » représentent aujourd'hui un actif stratégique dans la transformation numérique de la société et de l'économie. L'ouverture et la diffusion des données offrent des opportunités considérables de création de valeurs et de nouveaux usages, dont la France doit se saisir.

La valeur marchande de la donnée tendra à s'amenuiser tandis que sa valeur ajoutée dans l'économie prendra de l'importance avec l'ouverture et la gratuité d'un nombre de plus en plus important de bases de données.

La loi Valter promulguée le 28/12/2015 et la loi Lemaire promulgée le 7 octobre 2016 sont 2 textes essentiels qui traduisent l'action du gouvernement "pour une République numérique" et particulièrement en faveur de l'ouverture des données.

La loi Valter - Décret d'application - Gratuité par défaut et autorisation de redevances

Dans cette loi qui transpose la directive PSI2, le gouvernement a voulu aller plus loin que la directive en instaurant par défaut un principe de gratuité de l'information publique et de sa réutilisation.

Des redevances de réutilisation restent cependant possibles pour certaines administrations lorsqu'elles sont tenues de couvrir par des recettes propres une part substantielle des coûts liés à l'accomplissement de leurs missions de service public.

Un décret en Conseil d'État (Décret n° 2016-1036 du 28 juillet 2016 relatif au principe et aux modalités de fixation des redevances de réutilisation des informations du secteur public) fixe la liste des catégories d'administrations qui seront autorisées à établir des redevances sur des critères supplémentaires :

  • l'activité principale de l'établissement consiste en la collecte, la production, la mise à disposition ou la diffusion d'information publique ;

  • la couverture des coûts liés est assurée à moins de 75% par des recettes fiscales, des dotations et des subventions. L'ensemble des coûts est calculé sur ces 4 activités et est lissé sur 3 ans.

La loi Valter prévoit également un décret simple supplémentaire qui précisera la liste d'informations publiques soumises à redevance par l’État et ses EPA. Ces deux décrets sont mis à jour tous les 5 ans .

En bref, il a été considéré que 4 établissements seulement pourraient désormais pratiquer les redevances : le SHOM, Météo-France, l'IGN et l'INSEE qui devront faire leurs calculs pour prouver leur éligibilité.

À noter cependant que les données de l'INSEE deviendront gratuites au 1er janvier 2017 selon les dispositions d'un article de la loi Lemaire.

La liste des produits ou catégories de produits concernés fera l'objet d'un autre décret à venir. Enfin, les fonds et collections des bibliothèques font aussi l'objet d'une exception.

La loi "pour une République numérique" dite loi "Lemaire"

La loi n° 2016-1321 "pour une République numérique" dite loi "Lemaire", publiée au Journal officiel de la République française du 8 octobre 2016, est le dispositif central de la stratégie numérique du gouvernement présentée le 18 juin 2015 à la suite d'une vaste consultation publique de 6 mois fin 2014 - début 2015.

Le titre Ier comporte des dispositions structurantes en faveur de la circulation des données et du savoir, dont les articles suivants :

  • Art. Ier : Il oblige les administrations à communiquer aux autres administrations les documents administratifs et données publiques. Cela comble un flou juridique, la loi CADA ne traitant que de la communication entre le public et le privé. Dans la ligné du rapport Fouilleron, les échanges de données au sein des administrations de l'Etat et de ses EPA deviennent gratuits. Ils font l'objet d'un « rebasage » budgétaire défini à partir des échanges des 3 dernières années.

  • Art. 2 : les codes sources font désormais partie des documents administratifs. Le projet de loi ajoute aux exceptions de diffusion l'atteinte à la sécurité des SI des administrations et la recherche et la prévention des infractions.

  • Art. 4 : communication à la demande de l'intéressé des algorithmes et règles de mise en œuvre pour les décisions individuelles.

  • Art. 6 : article très long qui traite de l'ouverture des données et du traitement des données à caractère personnel. Un décret précisera une liste de documents qui pourront être rendus publics sans traitement « permettant de rendre impossible l'identification des personnes ».

  • Art. 11 : Les administrations ne pourront plus utiliser leur droit de producteur de base de données pour s'opposer à une réutilisation de leurs données ; un décret fixe une liste de licences permettant d'encadrer les réutilisations à titre gratuit et des conditions d'homologation de licences alternatives.

  • Art. 12 : les données des services statistiques deviennent gratuites.

  • Art. 14 (Service public de la donnée) : Les données de référence sont définies. Un décret en conseil d’État en fixe la liste ainsi que les administrations responsables de leur production et de leur mise à disposition (avec critères qualité).

  • Art. 17 : les délégataires fournissent à la personne publique déléguante les données et bases produites à l'occasion de l'exploitation du service public.

  • Art. 19 : concerne le secret en matière statistique.

  • Art. 20 à 24 : Ouverture de bases de données relatives aux jugements, décisions judiciaires, vitesses maximales autorisées sur routes, production et consommation d'électricité et de gaz, déclaration des valeurs foncières.

  • Art. 30 : libre publication numérique des articles scientifiques après un délai de publication ; libre réutilisation des données de recherche si elles ont été rendues publiques pour les recherches financées à plus de 50% par l’État, les collectivités ou les établissements publics.

Un code pour réunir les textes

Dans la foulée de la promulgation de la loi Valter, un nouveau code voit le jour en janvier 2016, il s'agit du CRPA (Code des relations entre le public et l'administration). Ce code reprend notamment la plupart des articles de la loi Cada et ceux des lois Lemaire et Valter.

Cependant, comme son nom l'indique il s'adresse exclusivement aux relations entre l'administration et le public et ne traite donc pas des relations entre administrations. Pour celles-ci, il convient toujours de consulter les différents textes de loi et de décrets.

ComplémentPour en savoir plus sur la loi "Lemaire"

Pour une 1ère approche de la loi pour une République numérique :